jeudi 31 mars 2016

Le paradis à la porte : essai sur une joie qui dérange
Fabrice Hadjadj
Paris, Le Seuil, 2011. 498 pages.
  
  
«  Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. » (Jean  15, 11) : tel est le souhait de Jésus pour ses disciples et tel est son souhait pour nous. Ilo est bon de se rappeler en ces jours de Pâque. C’est ce que nous rappelle le livre de Fabrice Hadjadj : demeurer dans la joie malgré un climat environnant qui pourrait nous porter à se laisser gagner à la tristesse sinon au désespoir.

Vous avez peut-être lu l'Enfer de Dante mais jamais son Paradis : il équivaut à vos yeux à un néant immaculé. Or le paradis dantesque est bien plus différencié et violent que son enfer. Béatrice y déclare au poète : " Si tu voyais mon rire, tu serais réduit en cendres ". C'est pourquoi, au fond, l’on met facilement le paradis à la porte : pour ne pas affronter l'exigence de sa joie. Et la tentation est grande de se fabriquer à la place un petit paradis artificiel, rassurant... qui fait un enfer très convenable.

Certes, il ne s'agit pas de fuir vers un autre monde imaginaire, ni de régresser vers ce paradis terrestre définitivement perdu depuis la chute d’Adam et Eve dont nous parle la Genèse. A la notion d'un au-delà, on oppose à bon droit la requête de vivre hic et nunc. Mais n’est-on jamais vraiment ici, maintenant. C'est là que le vrai paradis révèle son paradoxe et se défend contre ses parodies : il n'est pas évasion vers un ailleurs, mais une grâce déchirante d'être présent à tous et à chacun, dans une ouverture symphonique, une créativité chorale.


Ce livre invite à un itinéraire à travers la philosophie, la théologie et les arts - de Nietzsche à Bonnefoy de Baudelaire au Bernin, de Sade à Mozart - afin d'approcher ce que le paradis a de plus terrible et de plus beau : la béance de sa béatitude. Oh ! il ne s'agit pas de se  consoler à peu de frais, non, mais de nous convoquer à cette joie qui doit vous faire perdre toute contenance - comme un clown - et détruire en vous tout contentement - comme un fleuve, lequel n'est lui-même que de se recevoir et de s'offrir sans fin...

Publication : Claude Tricoire - Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles

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